LA CONSTITUTION MAROCAINE EST UNE CONSTITUTION OCTROYEE*
Pourquoi
allez-vous boycotter les élections ?
La Constitution
marocaine est une Constitution octroyée. Le peuple n’a jamais participé à son
élaboration. Elle est antidémocratique et elle légalise un pouvoir personnel
quasiment absolu.
D’autre part, cette Constitution ne
reconnaît pas l'égalité entre l'homme et la femme. Elle ne reconnaît pas non
plus la langue et la culture amazighe comme langue et culture nationale. Pour
nous, une Constitution vraiment démocratique devrait reconnaître une très
grande autonomie à certaines régions, qui ont des spécificités tirées de leur
histoire. Nous pensons particulièrement au Rif, au sous et aux zayen.
Ces élections
se basent sur des listes électorales qui sont à notre avis truquées, sur un
découpage électoral fait sur mesure de manière à permettre aux forces proche du
pouvoir d’avoir un maximum de sièges. Ces élections continuent à être sous la
supervision du ministère de l’intérieur, lequel Ministère est responsable de 40
ans de falsification des élections. De même,
les émigrés et les jeunes de moins de 20 ans sont exclus du vote.
Sur le plan de
la législation, des lois qui rétrécissent l’espace de la liberté ont été votées
par le parlement ; je cite en
particulier le code de la presse, et il y a des lois qui sont en cours comme le
code des libertés public qui vont tous dans le même sens, à savoir mettre
des freins à la liberté des citoyens.
Le peuple marocain, échaudé par 40 ans d’élections falsifiés et habitués à des
représentants qui n’ont aucun pouvoir parce que le vrai pouvoir appartient au
palais, ce peuple-là, sans qu'on ait à lui demandé à boycotter, boycotte de
façon spontanée les élections, et je considère que contrairement à ce que disent un certain nombre de politiciens, il
ne s’agit pas d’une attitude nihiliste, mais d’une attitude tout à fait
rationnelle du peuple marocain puisqu’en fait il n’y a pas d’enjeu.
Le contexte
politique général dans lequel les élections se passent est caractérisé par les
répressions contre tous les mouvements de protestation (les diplômés chômeurs,
les militants des droits humains et les mouvements fondamentalistes).
Comment se
manifestera votre action ?
Cette fois nous
pensons vraiment aller vers le peuple en organisant une véritable campagne pour
boycott. Il se peut que nous soyons réprimés mais nous voulons assumer se
risque.
Comment avez-vous
obtenu le document que vous avez récemment publié ? Certains prétendent
que les services secrets ou des membres de l'OADP qui vous l'ont communiqué.
Ce sont des militants qui nous l'ont donné, et nous
avons jugé utile de le publier pour que les militants puissent en prendre
connaissance. Nous pensons que le régime ne donne rien si on ne l'impose pas
par notre lutte de tous les jours, et nous sommes contre ces marchés secrets
conclu dans les bureaux feutrés de tel ou tel ministère.
Quels sont les horizons de
vos alliances ?
Nous
voulons l'unification-fusion avec toutes les forces socialistes qui axent leur
action sur l'enracinement au sein de la classe ouvrière et des masses
laborieuses en général, pas avec les socialistes de salon. Nous ne considérons
pas les socio-démocrates comme socialistes dans le sens que ce sont des
libéraux avec une petite teinture humaniste. Nous croyons en le socialisme
scientifique.
Il a un
deuxième niveau, celui de l'alliance avec des entités démocratiques bien
définies. Nous sommes prêts à faire un large front avec ces forces-là sur la
base d’une plate- forme démocratique radicale qui devrait aussi lutter contre
le libéralisme sauvage.
Certains estiment que le
repli d’Ennahj Addimocrati par rapport à la gauche socialiste unifiée est dû à
ces postions relatives à certaines questions fondamentales telles que la
monarchie, le Sahara et la participation politique aux institutions.
Nous n’avons
pas de lignes rouges, nous pensons que le peuple marocain ne s’est pas encore
auto-déterminé quant au régime qu’il
veut. Ce qui nous importe le plus, ce n’est pas la forme de régime, mais son
contenu que nous voulons réellement démocratique, aussi bien sur le plan
politique qu’économique, social et culturel. Concernant la question du Sahara,
nous pensons qu’il faut soutenir à la légalité international. L'essentiel c’est
qu’il y ait une solution politique négocié entre les différentes parties pour que,
d’une part, la région ne bascule pas dans la guerre et d’autre part, pour créer
les conditions favorables à l'unification du Maghreb.
Concernant
la question des élections, nous avons pas de position de principe. Si des
conditions plus favorables étaient réunies pour qu’il y ait des élections plus
libres et plus honnêtes et qu’à travers notre participation à ces élections et
aux institutions nous puissions peser sur les orientations fondamentales de
l'Etat, je ne vois pas pourquoi on n’y participerait pas. Notre position est
donc liée à la conjoncture actuelle.
* Entretien avec Abdallah Harif, secrétaire général d’Annahj
Addimocrati, propos recueillis par Imad Bentayeb et Afef Jelassi (News Magazine
N° 8, du jeudi 1er août au
mercredi 2 octobre 20002).
index autres