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ASSOCIATION MAROCAINE
DES DROITS HUMAINS
L’Association Marocaine des
Droits Humains demande à ce
que le cadre juridique organisant le nouveau Conseil soit revu dans un
sens favorable à
la levée des contraintes entravant l’exercice de ses compétences, et en vue de renforcer
son indépendance.
Le Bureau Central de
l’Association Marocaine des droits humains a examiné, au cours de sa réunion
ordinaire à Rabat, le 30 avril 2001, le texte du Dahir relatif à la
restructuration du Conseil Consultatif des droits de l’homme.
Après discussion des
dispositions de ce Dahir, et vu l'évaluation négative que fait l’Association du
bilan du Conseil actuel, ses positions proches de celles du pouvoir, l'amalgame
qu'il a induit dans la présentation de la situation des droits humains, son
incapacité à jouer un rôle sérieux et à défendre les droits humains dans
les grandes affaires relatives aux droits humains, en particulier les dossiers
en suspens tels ceux des enlèvements et des disparitions forcées, de
l’emprisonnement politique, des victimes de la torture et des décès dans les
locaux des autorités…
Tout en rappelant les
propositions de l’Association quant à cette restructuration,
En comparant le Dahir
nouveau à celui précédemment en vigueur, et en confrontant les
dispositions de ce dernier à la lumière des principes et des critères
appliqués pour la création d’une institution
nationale des droits humains, le Bureau Central a abouti aux observations
générales suivantes :
· La fin de l’expérience du Conseil Consultatif
actuel du fait de sa restructuration, confirme son échec dans l’accomplissement
de ses prérogatives, ses fonctions et ses tâches qui sont confiées aux institutions
nationales consultatives de ce genre, et conforte la position exprimée par
l’Association vis à vis du Conseil Consultatif actuel ;
· Le Bureau Central note l’introduction
dans le nouveau Dahir de certains principes,
prérogatives et responsabilités, tels que les dispositions ayant trait aux
conventions internationales des droits humains telles que reconnues et en tant
que références ;
· De même sont cités les droits économiques,
sociaux et culturels en tant que partie non distincte de l’ensemble des droits
humains ; l’attribution au Conseil de prérogatives nouvelles dans le sens du
règlement des affaires par consensus ; l’encouragement de l’Etat à ratifier les
conventions ; la possibilité pour le
Conseil de donner son opinion sur le rapport annuel établi par le responsable
du développement et de la communication ;
la possibilité d'auto-saisine des affaires relatives aux droits humains
; la limitation à un rôle consultatif des représentants du pouvoir exécutif ;
la réduction de représentation des partis politiques au sein du Conseil ;
la possibilité d’être membre volontaire et bénévole, et l'ouverture de la
possibilité de tisser des relations de coopération avec les instances
onusiennes, ainsi que les institutions régionales et nationales.
L’effectivité de ces éléments positifs
évoqués est cependant bloquée par un ensemble de pratiques qui influent
négativement sur l’indépendance du Consei
Consultatif dans sa nouvelle version,
et s’opposent à l’autorité réelle et nécessaire des institutions nationales de
droits humains, handicapant l’action du Conseil et sa capacité à accomplir ses
tâches et à exercer ses prérogatives. Ces contraintes peuvent être résumées
comme suit :
· Le Roi occupe en tant qu’autorité, une place
centrale dans le contrôle des travaux du Conseil et jouit de l'hégémonie sur la
conduite du futur Conseil. Ainsi d’après le Dahir, l’ordre du jour du Conseil,
la fixation des sessions, la création de commissions spéciales et la délégation
de certaines prérogatives au Président du Conseil ne peut avoir lieu qu’avec
l’accord du Roi ;
· Le Dahir a accordé au Président du Conseil qui est
désigné et non pas élu par les membres du Conseil, une place centrale et
particulière à travers la préparation du projet de l’ordre du jour et du projet
de budget ainsi que son ordonnancement et l’élaboration du règlement intérieur
du fait qu’il est le porte parole officiel du Conseil ;
· Pour ce qui est de l’action directe du
Conseil en matière de droits humains, les dispositions du Dahir ont restreint
le champ d’intervention personnelle de cette instance en prévoyant la majorité
des deux tiers, ce qui constitue un mécanisme de blocage, en contradiction avec
les règles de gestion démocratique ;
· Le Dahir a reconsidéré la qualité de membre du
Conseil et en a fait une mission bénévole, mais il a prévu des indemnités de
missions. Le Bureau Central de l'AMDH craint que ces indemnités deviennent des
rémunérations forfaitaires et stables ;
· Le mode de désignation des
représentants de la société civile au prochain Conseil sur la base
d’une liste contenant trois personnes, proposée par les instances
concernées, n’est pas conforme au dynamisme de la société civile relevé
d’ailleurs par le préambule dudit Dahir. Il traduit une tutelle inadmissible et
constitue une atteinte à l’indépendance des institutions et des organisations
de la société civile.
Le nouveau Dahir a omis
d’introduire :
1. Des
dispositions permettant de révoquer les membres du Conseil dont le comportement
est incompatible avec les qualités d’impartialité, d’honnêteté, de compétence
et d’attachement aux droits humains ;
2. L’immunité des
membres du Conseil contre toute poursuite judiciaire à cause de leurs déclarations
ou de leurs actions accomplies dans le cadre de leur mission en tant que
membres du Conseil ;
3. Des sanctions à l’encontre des pouvoirs
publics et des établissements publics et privés qui refuseraient de prêter
assistance au Conseil dans l’exercice de ses prérogatives ;
4. La
création de canaux particuliers dans le Conseil permettant la communication
avec les citoyens et leur donnant l’occasion d’y recourir.
Sur la base de ce qui
précède, le Bureau Central demande que le cadre juridique organisant le nouveau
Conseil soit revu. Il demande que soient supprimées toutes les entraves à
l’exercice de ses prérogatives et à son indépendance. Il insiste pour qu'il
soit maître de la diffusion des résultats de ses travaux, de ses rapports, de
ses recommandations et propositions, qui ont un caractère consultatif, sans
soumission préalable à une autre autorité. Il demande qie le Conseil soit
maître de son agenda. Il insiste pour la garantie de l'indépendance du Conseil
dans la gestion et dans l’exécution, l'indépendance étant la garantie
fondamentale permettant au Conseil de participer efficacement à l’évolution de
la situation des droits humains au Maroc.
Le
Bureau Central
Le
30 avril 2001